J’ai ressenti un profond malaise en apprenant que nos basketteurs se sont vu refuser des visas par l’ambassade des États-Unis, compromettant ainsi leur stage de préparation. Ce genre de revers, humiliant pour l’image du Sénégal, aurait exigé discrétion, diplomatie active et responsabilité. Mais non. Fidèle à une pratique désormais bien rodée, le Premier ministre Ousmane Sonko s’est précipité pour publier un communiqué grotesque annulant un stage déjà rendu impossible par Washington.
Ce n’est plus de la communication : c’est du maquillage de réalité. C’est comme annoncer l’annulation d’un vol qu’une tempête a déjà immobilisé. On frôle le surréalisme.
Le plus déroutant, c’est cette confusion des rôles. Le premier ministre Ousmane Sonko n’a aucune compétence constitutionnelle en matière de diplomatie. La politique étrangère est l’apanage du président. Mais le chef du gouvernement s’arroge le droit de faire des clins d’œil appuyés à Pékin, espérant peut-être que la Chine nous sauvera de notre isolement croissant. Ce n’est pas un recentrage stratégique, c’est un aveu de solitude diplomatique.
Et les dégâts ne s’arrêtent pas là. Ce même isolement vient de coûter au Sénégal la présidence tournante de la CEDEAO. Une opportunité majeure, une tribune d’influence que beaucoup voyaient promise à Son Excellence Bassirou Diomaye Faye. Elle nous échappe. Et ce n’est pas un hasard : nos voisins observent. Ils constatent l’agitation permanente, les discours irréfléchis, les tensions ouvertes avec les partenaires traditionnels et ils reculent.
Les propos incendiaires sur la politique migratoire américaine, les déclarations mal maîtrisées, les postures anti-occidentales assumées, tout cela a un coût. Et ce coût, ce ne sont pas ceux qui parlent fort qui le paient. Ce sont nos sportifs, nos artistes, nos chercheurs, nos entrepreneurs, nos étudiants, nos jeunes. Ceux qui ont besoin de circuler, d’échanger, de se former, de rêver plus loin.
Aujourd’hui, même pour se préparer, il faut franchir les barbelés de l’hostilité diplomatique. Dans ce nouveau régime, courir devient un acte politique, et demander un visa, une aventure.
J’en appelle à un sursaut de lucidité : le monde ne nous attend pas. Il nous observe, il nous évalue, et parfois, il nous sanctionne. À nous de décider si nous voulons continuer à faire de la diplomatie avec des communiqués ou reprendre place, dignement, dans le concert des nations. Le Sénégal a toujours su jouer un rôle de pont, de trait d’union entre l’Afrique et ses partenaires. Il a su historiquement, conjuguer souveraineté et ouverture, fierté nationale et responsabilité internationale. Il ne faut pas que cela change.
Il est encore temps d’opérer un retour à une diplomatie mature, cohérente, apaisée. Une diplomatie à l’image de ce que les Sénégalais attendent de leur leadership : de la maîtrise, de la clarté, du respect.
Le Sénégal est une voix qui compte. Encore faut-il qu’elle choisisse le bon ton.
Ibrahima Thiam, Président du parti ACT